Le petit joueur d’échecs de Yoko Ogawa

Le petit joueur d’échec de Yoko Ogawa

Un enfant dont les lèvres sont soudées, un éléphant coincé sur un toit de grand magasin, une petite fille perdue dans l’étroit espace entre deux maisons, un gros homme doux expert en pâtisserie et joueur d’échecs, un automate pour jouer aux échecs… Ce sont les ingrédients de roman envoûtant.

Il n’est pas nécessaire de connaître le jeu d’échecs pour s’immerger dans ces parties, car ce jeu se révèle une école de vie, une philosophie. Et pour le jeune garçon, l’échiquier deviendra un parcours initiatique.

Ce roman commence sur des variations sur l’enfermement de l’éléphante Indira, d’une jeune fille bloquée entre deux murs et des lèvres scellés du jeune garçon. Mais aussi de rencontres, celle d’un ancien chauffeur de bus obèse (il est également reclus dans le bus à cause de son embonpoint). Et c’est dans ce bus aménagé comme dans un palais que le jeune garçon va faire son apprentissage des échecs,  en compagnie d’un chat prénommé Pion.  Et c’est avec ce maître que le jeune garçon se décide à ne plus grandir, pratiquer les échecs sous la table pour mieux ressentir les pièces (leur mélodie).

« Le hasard n’est jamais un allié. Même les rencontres pour lesquelles on pense avoir eu de la chance ne sont pas dues à un hasard tombé du ciel, mais à la propre force du joueur. Sur l’échiquier apparaît tout du caractère de celui qui déplace les pièces, dit le maître du ton docte de celui qui lit un serment. Sa philosophie, ses émotions, son éducation, sa morale, son ego, ses désirs, sa mémoire, son avenir, tout. On ne peut rien dissimuler. Les échecs sont un miroir qui donne une idée de ce qu’est l’homme. »

Poésie, on frôle les mondes imaginaires dans ce bus transformé, dans des piscines, des salles de douche transformées. Une alchimie qui va mélanger échecs; dont les transcriptions sont des poèmes et des sensations. De l’indicible pratiquement dans cette poésie qui allie autant de sensibilité que de cruauté.

C’est le dernier livre de Yoko Ogawa que je n’avais pas encore absorbé. C’est maintenant chose faite. Et c’est toujours un ravissement d’être emporté dans ce monde, cet univers onirique. Car dans ‘Le petit joueur d’échecs’ on va apprécier cet enfant, l’amitié, la douceur qui en découle, mais également les liens innombrables qui sont tissés d’un roman à l’autre.

« jouer aux échecs, c’est peut-être comme si on marchait en voyageant d’étoile en étoile »

On retrouve des personnages qui sont attachants, mais souvent abîmés, modifiés, transfigurés. Ici le jeune garçon possède les lèvres soudées, son maître d’échec est hors norme.  Les héros d’Ogawa doivent souvent être hospitalisé, ‘amour en marge’,   ont eu un accident ‘l’annulaire’, ‘La Formule préférée du Professeur ,…

Dans le monde d’Ogawa les héros ont des dons ou des métiers bien particulier  – les mathématiques, les parfums, muséographe …. Ici le jeune garçon possède un don : celui de jouer aux échecs.

Le monde d’Ogawa est aussi représenté par des lieux : Ou l’on retrouve par exemple la présence d’un musée (La jeune fille à l’ouvrage, le musée du silence … ), mais aussi de la piscine !!. Les endroits clos, isolés du monde ( La Petite pièce hexagonale, …) ici l’automate du petit Alekhine, ainsi que le lit du jeune garçon.

‘Le petit joueur d’échecs’ est un roman vraiment attachant, dont il est difficile de ne pas tomber sous le charme de ces personnages, de la poésie qui s’en dégage, de la délicatesse de chaque mouvement, de la symphonie qui se dégage de chacune de ces parties d’échecs.

Divers :

  • Titre original : Neko wo Daite Zô to Oyogu, 猫を抱いて象と泳ぐ, 2009
  • ACTES SUD, 2013
  • traduction du japonais par Martin Vergne

6 réflexions sur « Le petit joueur d’échecs de Yoko Ogawa »

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