Scène d’été est une nouvelle de moins de 100 pages. Elle nous raconte les frasques d’un riche commerçant, Keizô. Commerçant marié, plutôt pingre atteint par le ‘démon de midi’. Une attirance pour une geisha qu’il rachète pour en faire sa concubine à moindre coût.
Par conséquent, lorsqu’il eut fait le compte de diverses dépenses encourues à chaque rencontre – rémunération de la fille, pourboires, location d’un salon dans une maison de rendez-vous machiai, sans oublier les cadeaux pour les fêtes de la mi-été et de fin d’année –, il vit que régler d’une fois le coût de plusieurs mois de rencontres n’allait certainement pas le ruiner et qu’il pourrait, en n’entamant qu’une partie de ses bénéfices mensuels, équilibrer son budget d’une façon fort satisfaisante ;
Geisha un peu spéciale, car elle ne représente pas la femme raffinée que l’on conçoit, mais plus comme une prostituée du monde flottant.
Tant le débraillé et le manque de classe d’O.Chiyo dans son kimono que la lourde chaleur dégagée par son corps aux fesses rebondies procuraient à Keizô une sensation de liberté et d’opulence que ne donnent guère les geishas, mais qui lui rappelait étrangement le corps dénudé des actrices occidentales entraperçu au cinéma. Ainsi, tout ce qu’une geisha traditionnelle, soucieuse avant tout de raffinement désinvolte, aurait appelé un défaut impardonnable, devenait aux yeux de Keizô un des plus fascinants atouts de cette femme.
Mais cette différence avec les autres geishas, fascine Keizô par sa sensualité. Mais il découvre bientôt qu’elle continue de fréquenter un ancien client. Keizô perd peu à peu l’exclusivité envers O.Chyo. Le rapport s’inverse peu à peu entre les deux protagonistes.
Histoire en partie autobiographique, « Après la mort de son père, il rejette peu à peu le conformisme honorable un temps apparemment accepté. Il divorce de l’épouse imposée par la famille, se met en ménage avec sa geisha préférée ». Kafu est aussi un spécialiste de la littérature française, de Maupassant, de Zola. On retrouve un peu de ‘Boule de Suif’ dans cette nouvelle.
J’ai beaucoup apprécié cette nouvelle remplie de poésie, qui apporte une brume vaporeuse d’érotisme. Une visite dans le quartier des plaisirs du Japon ‘Yoshiwara’ , des amours vénales du début du 19è siècle.
Quelques extraits
- Tant le débraillé et le manque de classe d’O.Chiyo dans son kimono que la lourde chaleur dégagée par son corps aux fesses rebondies procuraient à Keizô une sensation de liberté et d’opulence que ne donnent guère les geishas, mais qui lui rappelait étrangement le corps dénudé des actrices occidentales entraperçu au cinéma
- Personne probablement n’était mieux faite qu’elle pour devenir à ce point le jouet des hommes. Être traitée de la sorte ne provoquait apparemment chez elle aucune réaction particulière, ni honte ni souffrance, ni quoi que ce soit d’autre, et, à l’occasion, elle donnait même au contraire l’impression de prendre une curieuse satisfaction à n’être qu’un simple objet de plaisir. Putain, O.Chiyo l’était de la tête aux pieds. Livrée corps et âme à tout venant, elle était la femme la plus facile au monde à aborder ; en revanche, elle était aussi la plus difficile à se laisser monopoliser.
Divers :
- Titre original: NATSU SUGATA, 1914, The Heirs of Nagai Kafû, 1915
- Edition du Rocher, 2005
- Postface de JC Tschudin
Je te conseils aussi « Interminablement la pluie » du même auteur, si tu ne l’as pas déjà lu…
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Non, pas encore lu. J’avais prévu de lire le secret de la petite chambre. Mais je note celui-là 🙂
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Décidément, toujours de belles découvertes quand je passe chez toi 🙂
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Ça me plaît ça… Je note!
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Bonne lecture pour l’été qui approche 🙂
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