Les tendres plaintes de Yoko Ogawa

Les tendres plaintes de Yoko Ogawa
Les tendres plaintes de Yoko Ogawa

 

Une femme, Ruriko quitte le domicile conjugal pour un chalet familial dans la montagne. Elle veut mettre de la distance avec son mari infidèle qui la blesse. Calligraphe de profession, elle a prévu d’achever sa dernière commande, la biographie d’une très vieille dame anglaise qu’une longue suite de tragédies ont finalement menée au Japon. Dans ce chalet elle va faire la rencontre de deux êtres Nitta facteur de clavecin, et Ruriko son assistante. Ruriko va tomber sous le charme de Nitta 

Pour une fois nous avons affaire avec une narratrice nommée ‘Ruriko Hino’, nous retrouvons des personnages blessés physiquement ou moralement Le chien Dona qui est aveugle, et deux personnages dont Nitta ex-pianiste qui ne peut plus jouer en public, et Kaoru dont le fiancé à été assassiné et qui essaye de fuir ce souvenir. Ils ont pu se reconstruire ou s’assembler tel des pièces de puzzle pour trouver une symbiose. Ruriko, meurtrie va essayer de s’introduire dans cette sphère, essayé d’éloigner Kaoru de Nitta. Elle semble y parvenir un moment pénétrant leur intimité, elle capte l’amour de Nitta, puis par le biais de vêtements, d’une calligraphie pour le clavecin, d’un morceau de musique pour le concert. Mais se trouvera éloigné malgré elle. Une jalousie se met en place Nitta joue pour Kaoru « Les tendres plaintes » de Rameau, lui qui se refusait ou ne pouvait interpréter en public.  Ruriko ne supportera pas cette offrande qui aura Kaoru comme seule bénéficiaire. Un caractère étrange que Ruriko qui mêle du désespoir, des fantasmes, des envies de la passion et de la jalousie avec la reconstruction de son image, ainsi que lui fera comprendre son professeur de calligraphie

Une écriture douce, poétique tout en retenue, en délicatesse. Tout semble doux, calme, paisible, mais le malaise n’est jamais très loin « Les papillons étaient revenus. Nos voix baignaient dans les doux rayons du soleil, après avoir flotté un peu alentour, étaient englouties par le marais » p148. De la même manière que les âmes des protagonistes. La nostalgie est également présente. La disparition  d’une personne dont l’existence est remplacée par une autre  ‘la place de théâtre’, des moments passés et perdus ou ratés.

La lecture de ce roman d’Ogawa avec comme musique de fond les références musicales cités est de toute beauté. le rythme musical et celui de l’écriture se mêlent pour lier les sentiments et les émotions qui imprègnent ce roman.

On retrouve la récurrence des thèmes familiers  d’Ogawa. Le mari  infidèle et violent qui va disparaitre de la vie de Ruriko, il est toujours éclipsé de tous les romans. L’attraction de la narratrice pour un personnage dont l’âme ou le physique est blessé. La femme de Nitta est conservateur de musée ( musées et collections sont souvent présents dans ses oeuvres). Mais également l’obsession pour l’écriture que l’on retrouve dans de nombreuses nouvelles ainsi  que des modes d’écriture et des moyens dont les doigts comme vecteur de sensation.

 

Citations :

  • Nous avons joint nos lèvres. La couverture est tombée une deuxième fois. Il y a eu un bruit de chaises ébranlées. Ce fut un baiser calme. Un baiser qui a réchauffé discrètement les ténèbres derrière nos paupières.
  • Je me rappelais les mains de mon mari. Ses paumes désinfectés et boursouflés quand il venait de jeter ses gants de chirurgie, je les revoyais à l’instant où elles s’abattaient sur moi. Mais cela ne m’était pas désagréable . Au contraire cette douleur m’avait enseigné qu’il ne fallait jamais hésiter p42
  • Aussitôt après elle met au monde des jumeaux, mais l’un meurt étranglé par son cordon ombilical, tandis que l’autre se noie dans le liquide amniotique p61

Références

  • Les tendres plaintes de Jean Philippe Rameau
  • Six sonates pour violoncelles et basse continue de Vivaldi
  • Récital de musique française pour le clavecin de Gustav Leonhardt
  • Concerto pour clavecin n°1 en ré mineur Bach
  • Recueil d’arias pour le clavecin Sefauchi’s Farewell
  • Troisième recueil des pièces pour clavecin de Couperin
  • Fantaisie chromatique et fugue Bach
  • Les lamentations du prophète Jérémie

Divers :

  • Titre original : Yasashii uttae, 1996
  • Editeur :Babel, Actes sud 2010
  • Traduction : Rose-Marie Makino-Fayolle et Yukari Kometani
  • Note : ***** (3,8/5)

4 réflexions sur « Les tendres plaintes de Yoko Ogawa »

  1. Je dois lire Hôtel Iris de cet auteur avant de me lancer dans le reste de sa bibliographie. Tes mots pour décrire cette lecture sont très tentants mais une chose à la fois devient de plus en plus mon slogan en terme de lecture.

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    1. Bonjour lydieetseslivres,
      Dans mes préférés pour le moment : Hôtel iris, L’amour en marge , Les Abeilles. Mais je n’ai pas encore lu toute la bibliographie (C’est mon challenge personnel). Ce sont des romans très courts et très prenants.

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  2. Il faudra que je relise cette auteure que j’avais beaucoupé aimés avec « la formule préférée du professeur »
    Comme tu dis « Une écriture douce, poétique tout en retenue, en délicatesse »
    Bon dimanche 🙂

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